Bouvines est situé sur la rive droite de la Marque, sur la voie romaine d’Arras à Tournai. Petit village agricole, Bouvines est célèbre par la victoire de Philippe-Auguste en 1214, et par sa célèbre église, dont les vitraux retracent l’histoire de la bataille.
On trouve la première mention de son nom en 1002 (Villa bovinas), dans la charte du comte de Flandre.
Les habitants sont au nombre de 747 sur une surface de 2,71 km2.
Certaines fermes existent depuis des siècles, et sur les murs des plus récentes on peut voir des dates de construction du XIXe.
Bouvines joue un rôle symbolique pour toute la France à cause de sa « victoire fondatrice » déterminante dans la construction de l’idée politique et culturelle de nation. Elle marque la naissance d’un sentiment national. La bataille de Bouvines a contribué à un profond bouleversement géopolitique et culturel de l’histoire de France et eut un grand retentissement en Europe. 800 ans après ce chapitre majeur de l’histoire de France, le site a peu changé ou presque, il a conservé ses traits et usages : un plateau agricole aux larges perspectives, entouré de vallées humides, abritant villages et boisement. L’inscription en cours au titre des sites remarquables pourra ainsi aider notre territoire à protéger ce site historique exceptionnel.
Village historique du Pays lillois – La seule commune des environs de Lille qui soit connue internationalement – Situation à équidistance entre Lille et Tournai (une quinzaine de km), sur une « cluse » de la vallée de la Marque coupant géologiquement le dôme calcaire/limoneux du Mélantois – Au bord de la vaste et fertile plaine transfrontalière de Bouvines-Cysoing-Esplechin (open field distinct des bocages argileux de Pévèle) – Plaine en voie de protection au titre des Sites remarquables (enquête d’utilité publique) – « Plateau » carrossable, donc propice aux mouvements de cavalerie et aux charrois: un des passages stratégiques (cf. le nom de « Pont-à-Bouvines » sur les cartes d’Ancien Régime) à l’est de Lille, lors des nombreuses batailles que connut ce couloir des invasions, depuis l’irruption des légions de Jules César jusqu’au Blitzkrieg de mai 1940 – Chemin médiéval Seclin-Bouvines-Tournai, baptisé « chemin de Saint Piat », en cours de labellisation (projet Inter-reg IV) afin de promouvoir les randonnées pédestres ou cyclo-touristiques transfrontalières
Patrimoine bâti
Eglise Saint-Pierre (cf. détails plus loin), classée MH en 2010, située sur une légère colline au centre du village : de style néogothique (1880-1883 ; architecte Auguste Normant) ; les 21 verrières classées MH dès 1981, créées par la maison Champigneulle, de Bar-le-Duc (1887-1906) retracent les épisodes-clefs de la bataille du dimanche 27 juillet 1214
Plusieurs « censes » (domaines abbatiaux ou seigneuriaux avec bâtiments d’exploitation, d’origine médiévale) dont celle de la Courte au bord de la Marque, au nord du village, et celle des Mottes (disparue) au sud, dépendaient de l’abbaye de St Amand et de celle de Cysoing
Monastère (privé) occupé depuis 1945 par des moniales dominicaines cloîtrées, puis par la Communauté catholique et œcuménique du Chemin Neuf (Lyon) en 2003 ; auparavant château de la famille du conseiller général-maire Félix Dehau (1846-1934) ; ancien relais de chasse (1865) agrandi par l’architecte Auguste Normant
Obélisque commémoratif de la bataille de 1214, au bord de la route Lille-St Amand, près de l’estaminet (ancienne école du village, 1844) ; érigé en 1863 sur les plans de l’architecte Charles Marteau, avec l’aide financière de la Commission historique du Nord, à l’instigation notamment de Louis Defontaine, conseiller général du Nord, grand-père maternel de Félix Dehau
Fontaine St Pierre (en cours de restauration sous l’égide de la « Fondation du Patrimoine ») où le roi Philippe Auguste se serait désaltéré le jour de la bataille ; maintenant au fond d’une « voyette » (ruelle, ou piedsente), le long du mur du « petit château » ; lieu de pèlerinage jusqu’aux années post-conciliaires
Belle demeure appelée « moutier », « prieuré », ou « petit château » (privé) de la fin du XVIIe siècle, qui fut le premier presbytère du village, desservi par les chanoines augustins de Cysoing ; racheté comme Bien national pendant la Révolution par la famille Virnot, puis par la famille du général Achille Deffontaines (1858-1914), le premier des 41 généraux français tués lors de la Grande guerre
Plusieurs belles fermes à cour carrée du XIXe siècle, spécialisées dans la production du « chicon » (endive), l’élevage de charolais et la culture céréalière. Ancienne gare du tramway omnibus à vapeur de la ligne à voix métrique Hellemmes-St Amand-les-Eaux (1893-1933). Plusieurs chapelles dont la chapelle votive St Hubert (1872), construite par la famille Dehau ; peut-être sur les plans l’architecte Charles Leroy : style néogothique assez proche de celui de la chapelle funéraire de la famille Gonnet au cimetière de Lille-Est ; 7 vitraux d’Edouard Didron
cf. photos et descriptifs plus complets sue les 2 prospectus gratuits en couleurs distribués par la mairie de Bouvines : « Balades culturelles à Bouvines, Circuit court + Circuit long »
Patrimoine environnemental
- Rives de la Marque, avec chemins piétonniers aménagés par Espace Naturel Lille Métropole, reliant Marquette à Ennevelin sur près de 30 km
- Parc arboré (privé) du château Dehau (chênes bicentenaires, marronniers d’Inde, marronniers d’Amérique, ailantes, sophoras, pins rouges, etc…)
L’église St Pierre de Bouvines
Depuis le XIe siècle, d’après les documents anciens (charte de donation de la « villa de Bovinas » par Arnould et Richilde aux bénédictins de St Amand, datée de « l’an de l’Incarnation 1002 »), il existe un sanctuaire érigé sur la colline St Pierre, d’où le vocable de l’église. En 1164, une charte de Gérard, évêque de Tournai, cite explicitement « l’autel et la dîme de Bovines ». Après maints procès, le collateur du bénéfice de Bouvines sur le pouillé diocésain (donc le responsable de la nomination du desserviteur, et de l’entretien du choeur) fut l’abbé de Cysoing, et le décimateur fut le seigneur du lieu, l’abbé de St Amand.
Sous l’impulsion de Guizot, Mérimée, Ludovic Vitet, Arcisse de Caumont, ou Viollet-le-Duc, toute une génération de militaires, de prêtres, d’architectes, de chartistes (à la suite de savants comme Charles de Grandmaison ou Joseph de Saint-Genois), formèrent des sociétés savantes dans toute la France. Ils mirent en honneur la notion même de patrimoine, patrimoine bâti et non bâti, matériel et immatériel. Le XIXe siècle sera vu comme celui de l’Histoire (notamment médiévale), passion illustrée aussi bien par des historiens comme Michelet, Augustin Thierry, Fustel de Coulanges que par des gens de lettres comme Chateaubriand, Victor Hugo ou Vigny.
Ainsi, dans la région lilloise, depuis la fin du Premier Empire, des observateurs locaux, des fonctionnaires, des élus – souvent monarchistes, mais pas uniquement – et la plupart des voyageurs ou des « antiquaires » de passage s’étonnaient de la discordance entre la notoriété internationale d’un événement lui-même international (le dimanche 27 juillet 1214) et l’absence de tout monument évocatoire sur le terrain. On faisait, par exemple, visiter à Lille l’Hospice Comtesse aux délégués des ministres parisiens ou aux diplomates étrangers, on y évoquait toujours le voeu de la comtesse Jeanne de Flandre si Ferrand revenait vivant de la bataille, mais sur la plaine du champ de bataille, rien !
A lire, par exemple, François Chon (1812-1898), né à Laval, agrégé d’histoire, nommé professeur à Lille dès 1835, on peut émettre l’hypothèse explicative que certains bourgeois républicains et orléanistes des villes du Nord freinaient en sous-main tout ce qui pouvait renforcer les légitimistes, très influents dans ces campagnes. Certains notables régionaux se mirent à cultiver une fibre flamande, provincialiste, opposée à l’unification de ces provinces du Nord par un Etat centralisateur (aussi bien celui de Louis XIV que celui des Jacobins). Ces négociants et industriels, empreints – souvent pour des motifs commerciaux – d’une soudaine anglo-germano-philie – répandaient l’idée que la bataille de Bouvines, à leurs yeux une défaite, devait être passée sous silence. On peut même se demander si, sans le dévouement désintéressé, et presque suicidaire politiquement dans cette contrée, d’un Félix Dehau, le souvenir de la bataille de Bouvines, dans la mouvance de la cité bimillénaire de Tournai, francophone et francophile depuis toujours. n’aurait pas connu le sort de celle de Mons-en-Pévèle (1304), délibérément niée ou occultée par un étrange régionalisme pro-flamand en terre picardophone.
Après les vicissitudes des incessantes guerres étrangères et civiles, l’église qui existait au même endroit à la fin du XIXe siècle ressemblait à d’innombrables et modestes églises de campagne du Nord de la France, rapetassée de bric et de broc au cours des siècles. La description précise qu’en donnait le curé Cyprien Roget en 1842, à la demande de son supérieur l’archevêque de Cambrai, ne laisse aucun doute : « Une nef de 17 m de long sur 7 m de large… des murs en pierre de craie sur soubassement de grès de taille, un chœur en briques élevé au XVIIIe siècle… une petite tour en bois… » Les photographies prises en 1879-1880 par Auguste Lenglart-Barrois, père de Mme Dehau (coll. Louise Dehau), peu avant le démontage de l’édifice, montrent clairement les fissures et les réparations grossières. André Droulers, érudit local et ancien maire, dans son Histoire de Bouvines (2003), nous incite à lire les délibérations du Conseil municipal. On peut y constater, par exemple à la date 10 mai 1878, que – contrairement à ce qui est ressassé çà et là – ce n’est pas Félix Etienne Dehau, le jeune maire (32 ans), qui décida seul, comme par une lubie personnelle, de la déconstruction du vieil édifice composite et de sa reconstruction dans un style néogothique homogène qui rappelât celui du XIIIe siècle.
Les silences et les indications du Mémoire sur la bataille de Bouvines, publié par le Lillois Lebon en 1835, semblent révélateurs. Lui qui était si avide de retrouver des traces parlantes de la bataille ne dit pas un mot de l’église de Bouvines de son temps. Cet auteur, qui dit habiter lui-même près de Bouvines, a arpenté longuement les lieux, dès l’époque de la Restauration (cf. p. 10 et suiv.), c’est-à-dire après les destructions des guerres révolutionnaires et avant les dévastations de l’industrialisation moderne. Soucieux d’examiner à peu près tous les monuments et documents anciens sur ce sujet (il dresse une liste raisonnée de plus de 150 sources), il est représentatif de cette foule d’érudits locaux d’après 1789 qui se passionnaient pour l’histoire et pour ce qui subsistait des vestiges du passé.
Il suffit de se reporter aux Bulletins de la Commission historique du Nord depuis l’année 1839, autrement dit dès sa création, pour constater qu’il est régulièrement fait mention, de manière désolée, de l’église de Bouvines, « vétuste, insignifiante, dépourvue de tout intérêt artistique »…, et du projet de sa reconstruction afin de « perpétuer le souvenir de ce lieu à jamais célèbre »… Ces mots sont du président de cette Commission, Alphonse de Contencin (1802-1862), grand commis de l’Etat, ami de Chateaubriand. A la suite de plusieurs autres experts dont M. Gentil-Descamps, mandaté par la-dite Commission historique du Nord (organisme créé sous la Monarchie de Juillet), deux architectes lillois, MM. Faucheur et Duez, avaient à nouveau, en 1858, à la demande du maire de Bouvines d’alors, Louis Desmarescaux, d’une famille établie là depuis des siècles, souligné « l’impossibilité de restaurer et de consolider l’édifice actuel . » Ils ajoutaient déjà que « sa démolition pourrait devenir nécessaire dans un prochain avenir dans l’intérêt de la sûreté publique. »
En résumé, l’ancien édifice menaçait ruine, coûtant de plus en plus cher en entretien à la Fabrique, donc aux Bouvinois qui en avaient assez de « déshabiller saint Paul pour habiller saint Pierre »… Cette pauvre « chapelle » de plus en plus branlante ne correspondait plus aux besoins d’une paroisse dont la démographie et la pratique religieuse progressaient sensiblement, après des décennies de déchristianisation et de déprètrisation tyranniques. Elle ne répondait pas du tout à la « fonction mémorielle » que bien des Français attendaient, sur place et bien au-delà, depuis la fin de la Révolution. Enfin, ce projet de bâtir un monument commémoratif de portée nationale, ostensible mais non ostentatoire, près de la frontière septentrionale du pays, n’est pas né avec Félix Dehau, mais bien avant lui. Celui-ci, ayant assumé les valeurs et les choix d’un milieu et de tout un courant de pensée, les a mises en oeuvre avec une rare opiniâtreté. Car les combats furent rudes dans une France de plus en plus divisée : un jeune rentier de ce temps-là, doué sous tous les rapports, cultivé, ne manquant pas d’entregent, aurait pu poser d’autres choix que de se mettre volontairement sur les bras durant toute sa vie une telle cause de soucis et de controverses !
Sur le rôle de Félix Dehau, le maire et maître d’ouvrage de l’église, beaucoup d’approximations ou même de légendes ont couru. Ce fils de famille, juriste de formation comme ses aïeux, , philanthrope, était avant tout un catholique ardent qui avait, dès sa jeunesse, consacré sa vie au militantisme religieux. Pas du tout un politicien, encore moins un idéologue. Un patriote ardent, mais pas un « nationaliste », encore moins un « réactionnaire germanophobe », comme le voulait la pensée officielle des années 1970/80. Il suivait avec opiniâtreté la voie tracée par ses ancêtres, de fervents catholiques sociaux flamands, surtout son père, lequel avait vite délaissé le notariat pour gérer la redistribution volontaire d’une grande part de sa fortune aux œuvres d’Eglise. F. Dehau s’était lancé dans l’interminable bataille de la reconstruction et l’ornementation de l’église de Bouvines en homme de foi et non en businessman, malgré l’ambiance d’agiotage de son époque. Il savait qu’il y avait davantage de mauvais coups à recevoir que de bonnes affaires à conclure ; cela explique d’ailleurs le peu de soutien reçu des « grandes famille du Nord », davantage occupées à leurs investissements rentables. Au demeurant, vers 1879-1880, au moment de l’édification de l’actuelle église, ce personnage n’était pas le crésus qu’on le prétend. Du côté Dehau, fortune immobilière et foncière datant de l’Ancien Régime, et non opulence industrielle ou commerciale récente. C’est plus tard, vers 1900, que, le dernier de son nom, il est devenu légataire universel de tous ses oncles et tantes, notamment les Dehau-Delaruyelle.
On apprend, en lisant les délibérations du Conseil municipal de Bouvines, qu’en 1857 l’humble obélisque de Bouvines fut une sorte de lot de consolation que le Conseil général du Nord offrit aux Bouvinois, afin de retarder le versement d’une aide financière à la (re)construction de l’église commémorative, que bien des citoyens appelaient de leurs vœux ! Une petite église tassée sur elle-même, presque cachée dans les arbres, les maisons et le cimetière qui la ceignaient, ne pouvait en elle-même rappeler, à deux pas du tout jeune Royaume de Belgique, le souvenir glorieux des gesta d’ancêtre héroïques.
On découvre aussi que le démontage en 1879 se fit avec le plus grand respect, et que le réemploi optimal des matériaux de la vieille église dans la nouvelle (grès, poutres, ferronneries, sans parler du mobilier…) fut une option de départ, décidée par l’architecte, le maire et les entrepreneurs Henri Thisse et François Martin, à la fois pour des raisons économiques (réduire les coûts) et pour des raisons symboliques (garder la mémoire de ces « pierres vivantes » posées par nos Anciens). L’actuel architecte du Patrimoine, François Bisman, chargé des travaux de restauration de l’église, classée Monument Historique, donne de multiples détails techniques, plans, schémas et illustrations sur toutes ces questions dans son étude Diagnostic et Mise en valeur du clos-couvert de l’église de Bouvines (janvier 2010 – chronologie détaillée du chantier et bibliographie systématique de sources archivistiques), qui constate que le chantier fut mené intelligemment, mais à l’économie, sans aucune dépense somptuaire « Ce beau monument de haute portée symbolique … projet nettement plus abouti que le grand nombre d’églises d’influence néogothique qui fleurirent dans le département… » (p. 2)
A ce sujet, il convient de séparer la question de l’église de celle des verrières : les Dehau dépensèrent bien davantage d’énergie, de temps et d’argent à la seconde qu’à la première. Le projet des immenses vitraux historiés avait un aspect beaucoup plus artistique, plus national et plus « engagé» ; il dépassait, et presque enjambait délibérément, le cadre lillois. Le Comité de souscription, qui fut créé pour récolter des dons et legs, s’orienta immédiatement vers les mécènes potentiels de l’aristocratie et vers les relations ministérielles ou mondaines que la famille entretenait à Paris dans les milieux conservateurs. L’église, à la vérité, ne fut totalement achevée dans son ornementation que peu avant la Grande guerre. Son aspect intérieur est, dès les festivités du VIIe Centenaire de la bataille en juin et juillet 1914, selon le témoignage des Anciens, impressionnant. L’atmosphère qui y régnait forçait le respect, suggérant à la fois l’intime et le sublime : une des preuves du « charisme » particulier de ce lieu réside dans sa totale préservation lors des deux dernières invasions/occupations de notre pays. Pas le moindre coup de fusil ! Pas un seul acte de vandalisme commis par les troupes allemandes contre cette transparente châsse de couleurs, cette fragile chambre non pas obscure, mais lumineuse. Les villageois et les visiteurs s’étonnent encore qu’elle soit restée indemne. Ce secteur était « zone interdite », particulièrement livrée à l’arbitraire de l’occupant. Quand on voit ce que l’armée allemande osa commettre, par exemple, sur la cathédrale de Reims en 1914, et sur tant de nos trésors architecturaux en 1940, on a du mal à expliquer rationnellement l’immunité « surnaturelle » ( ?) de ce lieu à la gloire de la bravoure française, conçu comme un rempart symbolique contre les « barbares envahisseurs venus de l’Est ». Ces officiers et des soldats allemands victorieux ont pu lire sans broncher – et en lettres gothiques par-dessus le marché – pendant deux fois quatre années une légende comme : « L’empereur Othon poursuivi par Guillaume des Barres abandonne lâchement son armée » (verrière n°10)… Mieux, le village de Bouvines fut même l’un des mieux préservés (comparativement à d’autres dans cette zone) durant la très dure période d’occupation du Nord, faite de réquisitions, de déportations et d’exactions, entre octobre 1914 et octobre 1918.
Il faut ainsi signaler au visiteur contemporain que l’intérieur de l’église semble avoir changé dans le sens d’une « froideur » nouvelle. Certaines initiatives du fameux renouveau liturgique autorisé par des interprétations controversées du Concile Vatican II ont entraîné dans maints églises de France un « dépouillement » parfois d’une brutalité telle qu’elle fut presque considérée par certains comme une forme de mépris pour la foi et de la piété de nos ancêtres. A Bouvines comme ailleurs, le sanctuaire, c’est-à-dire la survivance du fanum ou du péribole antique, a été « remodelé » à la mode des années 1980 au nom d’une sécularisation et d’une désacralisation discutables du catholicisme.
Cette église St Pierre de Bouvines, dans sa « version » voulue collectivement à la fin du XIXe siècle, revêtait délibérément, en plan et en élévation, une double fonction : celle, classique, de sanctuaire paroissial et celle, plus rare mais pas exceptionnelle, de mémorial national. Relisons à ce sujet les écrits de savants ecclésiastiques nordistes comme Chrétien Dehaisnes (1825-1897), Hector Quilliet (évêque de Lille, 1920-1928), L. Salembier, Th. Leuridan, L. Bataille, ou E. Lotthé, qui ont vulgarisé l’étude de ces églises de notre région. Ce programme constructif, avec ce double parti – l’un éclairant l’autre – n’a rien de paradoxal : la maison du « Peuple de Dieu » est aussi la maison de son Histoire, Histoire pas toujours sainte. Un événement fondateur de la nation française, un fait d’armes aux résultats si cruciaux et si inattendus, interprétés par certains chroniqueurs comme « miraculeux », un fait militaire comme la bataille de Bouvines, pouvait lors sans contradiction être magnifié dans un lieu dédié à la Pax Christi, au pardon réciproque, à la réconciliation, d’autant plus que, dès le XIIIe siècle, cette bataille européenne fut vécue et contée comme une gigantesque ordalie. Un combat judiciaire, un « jugement de Dieu » (même G. Duby n’a cessé de le répéter) fut livré entre Lille et Tournai afin de trancher des nœuds que les hommes avaient eux-mêmes emmêlés jusqu’à la démesure. La conclusion de cette Journée qui fit la France ouvrit en Europe une période d’essor économique, de concorde (relative) et de rayonnement culturel : « le Beau XIIIe siècle. »
La haute et fine église de Bouvines sert de repère topographique et chronologique. A l’heure d’une Europe un peu hésitante sur son avenir, un édifice aussi lumineux que celui-ci, vaut davantage qu’un coup d’œil en passant : il force à la réflexion sur le temps et sur le monde.
Vie associative
La commune de Bouvines connaît un vrai rayonnement non seulement par son passé mais par une acticité moderne, culturelle, sportive etc. tout à fait hors du commun par rapport à sa taille. Une quinzaine d’associations pour un petit village de 700 habitants et surtout des associations qui drainent des flux importants de publics extérieurs au village, et de nombreuses retombées médiatiques…
Quelques exemples :
- Oxygène dont les spectacles de danse moderne attirent des milliers de personnes et qui se déroulent aussi dans d’autres communes de la métropole lilloise
- le Théâtre de la Plaine, fondé en 1995 par Gérard Harrivel-Bour, en même temps que le FESTAR (Festival d’expression artistique en milieu rural), qui fidélise chaque année lors de sa fameuse Quinzaine théâtrale (au mois de mai) des milliers d’ « amateurs de planches » http://tdp59830suite.canalblog.com
- Les Amis de Bouvines, une des plus anciennes associations d’histoire et de préservation du patrimoine du secteur, créée en 1967 par le maire de l’époque Gonzague Spriet, et dont Christian Maille fut vice-président, avec un site Web mis en ligne dès 2003 : http://www.lesamisdebouvines.com
- ou encore Bouvines 2014, association créée en 2009, présidée par le maire actuel, Alain Bernard, vice-président de LMCU, pour préparer la prochaine commémoration du VIIIe centenaire de la bataille http://www.bouvines2014.fr