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Le Bouvines, un bateau de guerre, berceau de la « littérature engagée » ?

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Une fidèle lectrice a écrit récemment aux Editions APAD pour livrer des citations d’un livre tout à fait inattendu qui fait plusieurs fois mention du nom de « Bouvines »:

« …La vie de Jean-Baptiste se résuma alors à quelques dates, quelques déplacements… Puis de nouveaux embarquements sur le Calédonien … et le Bouvines … Un beau jour, tandis que, sous les ordres du commandant du Bouvines, le capitaine de vaisseau Dufaure de Lajarte, Jean-Baptiste s’occupait avec une persévérance et une patience dignes d’éloges des écoles de pointage, il eut droit à une escale et se retrouva à Cherbourg seul. Il savait que l’un de ses anciens camarades de la promotion 95, Georges Schweitzer, y était devenu entre-temps ingénier du Génie maritime… Quelques jours plus tard, Schweitzer présenta à Jean-Baptiste sa soeur Anne-Marie… Jean-Baptiste épousa Anne-Marie le 5 mai 1904 à Paris… Trois mois après son mariage, Jean-Baptiste rejoignit en rade de Brest son cuirassé le Bouvines… »

Peut-être avez-vous deviné qui sont ces personnages ? Anne-Marie Schweitzer est la cousine germaine d’Albert Schweitzer (1875-1965), le célèbre médecin et musicien ; elle est la mère de Jean-Paul Sartre. Jean-Baptiste Sartre, ancien élève de l’Ecole Polytechnique (promotion 1895), officier de marine, est le père du philosophe… Il n’est pas certain que cet « auteur d’avant-garde » aurait apprécié de voir ce rapprochement « surréaliste » entre l’Histoire de France, l’Armée, la Théologie, l’Alsace occupée, la Médecine et … lui !

Source : Annie Cohen-Solal, Sartre : 1905-1980, éd. Gallimard 1985, pp. 33-36


le-bouvines

Le navire de guerre Bouvines, construit sur les chantiers La Seyne-sur-Mer, a été mis en service en 1894. Il est vendu à la démolition à Cherbourg en 1920.

Caractéristiques :

  • Taille : 89 m de long X 17 m de large
  • Poids : 6610 t
  • Propulsion : 8800 cv, 2 machines horizontales à triple expansion Menpenti, 16 chaudières Allest-Lagrafel, timbrées à 15 kg/cm2, 2 hélices.
  • Vitesse : 16,5 nœuds, rayon d’action de 3900 milles à 8 nœuds.
  • Armement:
    • 2 canons de 305 en tourelles axiales,
    • 8 canons de 100 mm modèle 1892 derrière masques,
    • 8 canons de 47 mm, modèle 1885,
    • 3 de 37 mm,
    • 2 TLT aériens de 450 mm (supprimés en 1906)
  • Protection: ceinture cuirassée complète de 2270 t

Historique :

Les navires du type Bouvines, construits comme garde-côtes cuirassés, seront reclassées cuirassés de 2e rang.

Début 1896, il rejoint Brest et devient navire amiral de la 2e escadre du Nord.

En 1898, il retourne à Toulon et y reste en réserve jusqu’au 15 décembre 1898 quand il est réarmé comme navire amiral de la division des garde-côtes dans l’escadre de Méditerranée.

En 1900, le Bouvines est rattaché à l’escadre du Nord à Cherbourg dont il deviendra bâtiment amiral de la 2e division.

Jusqu’en juin 1906, il participe à de grandes manœuvres en Méditerranée (1901), Algérie et Tunisie (1902), Manche et Gascogne (sorties en 1902), Algérie et Provence (1906).

En 1912, il retourne en réserve à Cherbourg.

Lors de la Grand Guerre, il devient bâtiment d’arraisonnement du front de mer de Cherbourg jusqu’en 1917.

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Un poème centenaire : 1214/1914

Un poème centenaire vient de nous parvenir par l’entremise d’une vieille famille du Pas-de-Calais, écrit par une «adolescente d’autrefois» (pour pasticher le titre du dernier livre de François Mauriac), une descendante d’un des chevaliers présents à la bataille de Bouvines, qui l’écrivit lors des cérémonies de commémoration du 700ème anniversaire…

Famille de Montigny : blason
« Échiqueté d’argent et d’azur, à la bande engrêlée de gueules, brochante sur le tout »

1214/1914

Douze cent quatorze, ô date mémorable !
Avec Philippe Auguste, la France fut capable
De montrer sa valeur.
Les ennemis nombreux assemblés à Bouvines
Furent d’un coup d’éclat dispersés, mis en ruines
Par les Français vainqueurs.

Groupée autour du roi, la milice de France,
Pour la première fois déploya sa vaillance
A sauver le pays.
L’amour de la patrie s’éveilla en ces âmes,
Tous ils défendirent le brillant oriflamme
Orné de fleurs de lys.

A un certain moment, la victoire chancelle,
Le drapeau est en bas, les deux partis se mêlent
Pour saisir cette proie.
Un humble chevalier sans crainte du danger
S’élance, le ramasse et se met à crier :
« Le drapeau est à moi ! »

La France était sauvée par cet acte sublime,
Le roi Philippe nomma ce guerrier magnanime,
Galon de Montigny.
Ô notre illustre ancêtre, depuis sept cents ans,
Ton souvenir demeure au cœur de tes enfants
Fidèles à leur patrie.

28 juin 1914
Yvonne de M. (1898-1995), alors âgée de 16 ans

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Poème de Noël DEFFONTAINES

Le village et la bataille de Bouvines ont inspiré bien des personnes, parfois éloignées géographiquement de la région lilloise, mais parfois très proches : ici un Pévèlois de vieille roche, dont la famille est issue des Deffontaines de la Cense de la Courte, nous transmet sous une forme littéraire son amour pour l’histoire et pour ses racines familiales…

Extrait du recueil Au fil du temps (éd. Atelier Pour Ainsi Dire, septembre 2012)

1214 – Bouvines éternelle – 2014

Caressée par la Marque aux vertes frondaisons,
Et qui coule, alanguie, au calme du marais,
Face à la plaine immense, qui n’a point d’horizon,
Bouvines, la modeste, est un site sacré.

Son terroir infini où s’écrivit l’histoire,
Est encore préservé de l’érosion du temps.
Seules, une voie romaine, une croix de mémoire,
Et la « Chapelle aux arbres », sont les traces d’antan.

Sa fière et blanche église, dressée sur son coteau,
Semble être la vigie des risques de l’oubli.
En hommage au passé, ses sublimes vitraux,
Témoignent à jamais du combat sans merci.

Flamboyant au soleil, ses ogives de pierre,
Retracent en œuvre d’art les drames du combat
Comme idéalisés. Mosaïques-lumière,
Qui ne peuvent occulter la douleur des soldats.

Dans cette frénésie, de luttes en mêlées
Le creuset de la haine s’exprime en hurlements,
Hennissements de mort des chevaux éventrés,
Piétinant les cadavres et les agonisants.

Que ce soit la piétaille ou les gens cuirassés,
Ou l’ardente noblesse, hobereaux ou seigneurs,
Qu’ils soient des mercenaires ou réquisitionnés,
Ils sont tous les héros d’un acte fondateur.

Ce jour de canicule, couronné de victoire,
Fut fêté en fanfare, par un grand défilé,
Comme un air de triomphe, une page de gloire.
Et les milliers de morts furent vite oubliés !

Ainsi cette hécatombe et tous les sacrifiés,
Pour des desseins obscurs, ambitions de titans,
Pour une apothéose, furent le prix à payer.
Et l’histoire en a fait un aboutissement !

Et huit siècles ont coulé dans le gouffre du temps,
Comme ont coulé depuis, et les larmes et le sang,
Au rythme des canons, des envahissements,
Qui sont venus flétrir la frêle paix des champs.

Le site de Bouvines, son authenticité,
L’émotion qui surgit à ces évocations,
Resteront un symbole, centre de gravité,
Et prise de conscience pour toutes les nations.

Si la France y est née, depuis elle a grandi,
Et connu des épreuves. Qu’elle trouve à jamais,
Dans ce petit hameau, ce lieu de tragédie,
Pour elle et pour le monde, un grand espoir de Paix.

Noël Deffontaines (avril 2010)

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